Avec le temps l’image se brouille, s’use, s’estompe tel un palimpseste. Un télescopage avec d’autres événements, majeurs ou non, confond la lecture et embrouille le lecteur.
La photo est copiée, recopiée, brusquée, déformée parce que racontée de mille manières approximatives. On lui impose un sens, un discours qu’elle ne peut pas, dans sa platitude de fait, contester. Elle devient trace de traces laissées.
Certaines de ces photo ont été prises en août 1994 au Rwanda - quelques semaines à peine après le génocide des Tutsis - cette série de photos n’est pas une représentation du Rwanda en août 1994. Pourtant, elles y ont été prises, j’y ai été pour les prendre.
Maintenant elles font partie d’un passé recomposé.
Finalement, est-ce qu’une image photographique raconte la vérité, une vérité quelconque ? Elle n’est peut-être plus qu’une archive hors contexte, déconnectée de ce qui a été la hyper-réalité de 1994 : des rescapées qui ont (sur)vécu à l’horreur des horreurs.
La trace visuelle, la photo, est, en somme, banale et a besoin d’un complément d’information, une re-contextualisation pour avoir du sens.
J’ai essayé de récréer avec ces photo-collages l’ambiance onirique, dérangeante où les images de la réalité flottent dans les méandres de la mémoire d’autres réalités et de la déformation informationnelle. Tels mes tableaux, ces compositions ne sont pas des illustrations de quoi que ce soit mais des évocations subjectives qui incitent à réfléchir bien plus qu’à informer.